La scène politique malgache connaît un nouveau rebondissement avec la montée au créneau de Marc Ravalomanana et Hery Rajaonarimampianina, deux figures emblématiques de l’opposition républicaine. Dans une déclaration publique diffusée récemment, ces anciens dirigeants du pays ripostent fermement aux accusations portées contre eux par l’actuel chef de l’État.
Le week-end dernier, les deux ex-présidents ont publié une déclaration commune datée du 9 août, dans laquelle ils rejettent catégoriquement les accusations de campagne de dénigrement qui leur sont imputées. Selon le pouvoir en place, leurs contacts avec certains représentants de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) auraient eu pour objectif d’entraver la tenue d’événements officiels sur le territoire malgache.
L’opposition républicaine réfute ces allégations et précise que leurs échanges diplomatiques “ne constituent nullement une démarche politique partisane”. Au contraire, ils affirment qu’il s’agit d’une “alerte légitime basée sur des faits vérifiables et documentés”, conformément aux dispositions de la Feuille de route SADC adoptée pour Madagascar en 2011.
La Feuille de route de la SADC de 2011 avait été conçue comme un instrument de sortie de crise politique, signée par la quasi-totalité des acteurs politiques malgaches sous l’égide de la communauté régionale. Ce document établissait un cadre pour la transition démocratique et contenait des engagements précis en matière de gouvernance.
Selon Ravalomanana et Rajaonarimampianina, ces engagements font aujourd’hui l’objet de “violations répétées et systématiques”. Pour étayer leurs accusations, ils s’appuient sur les rapports et constats de plusieurs institutions reconnues :
Les deux anciens présidents dressent un tableau préoccupant de la situation des droits et libertés à Madagascar. Parmi les principales violations qu’ils dénoncent figurent :
Cette sortie publique des anciens présidents s’inscrit dans un contexte politique particulièrement tendu à Madagascar. Depuis sa réélection fin 2023, le président Andry Rajoelina a consolidé son pouvoir, notamment avec la victoire de sa coalition IRMAR aux élections parlementaires de mai 2024, qui lui a donné une majorité absolue à l’Assemblée nationale.
L’opposition, regroupée notamment autour de la coalition Firaisankina, n’a obtenu qu’un nombre limité de sièges (22 sièges certifiés), ce qui renforce la position dominante du pouvoir en place. Cette configuration politique explique en partie la stratégie d’internationalisation adoptée par l’opposition, qui cherche à attirer l’attention de la communauté internationale sur la situation des droits humains dans le pays.
La SADC joue un rôle crucial dans la stabilité politique de Madagascar depuis la crise de 2009. L’organisation régionale avait d’ailleurs tenté d’organiser une mission politique dans le pays, mais celle-ci avait été bloquée par le président Rajoelina, ce qui avait créé des tensions avec les partenaires régionaux.
Les accusations portées par les anciens présidents visent également à sensibiliser la communauté internationale sur l’évolution de la gouvernance malgache. En s’appuyant sur les rapports d’organisations internationales reconnues, ils cherchent à donner une crédibilité à leurs dénonciations et à maintenir une pression externe sur le pouvoir actuel.
Cette nouvelle escalade rhétorique entre le pouvoir et l’opposition illustre la polarisation croissante de la scène politique malgache. Alors que le président Rajoelina dispose d’une assise institutionnelle solide, l’opposition mise sur la mobilisation de l’opinion publique et le soutien international pour maintenir une pression politique.
La réaction du gouvernement à cette déclaration sera déterminante pour l’évolution du climat politique dans les prochaines semaines. Les observateurs internationaux suivront également de près cette situation, particulièrement dans le contexte des engagements pris par Madagascar vis-à-vis de ses partenaires régionaux et internationaux.
Cette confrontation politique soulève des questions fondamentales sur l’état de la démocratie malgache et le respect des standards internationaux en matière de droits humains et de gouvernance. L’avenir dira si ce bras de fer entre anciens et actuels dirigeants débouchera sur un dialogue constructif ou sur un durcissement des positions de part et d’autre.
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